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SOCIETE FICTIVE, FILIALE DE  FACADE, CONFUSION DE SOCIETES : L’ABUS DE DROIT



    L’article 1832 du Code Civil rappelle que:

« Une Société constituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent d’affecter à une entreprise commune, des biens ou leur industrie, en vue de partager les bénéfices ou de profiter de l’économie qui pourra en résulter. »

La convention de société, exige donc, non seulement un accord de volonté des parties, mais encore la volonté de collaborer sur un pied d’égalité pour la concrétisation d’un travail commun : « l’affectio-sociétatis » se traduisant par une autonomie juridique vis à vis des personnes la composant, la personnalité morale pouvant être source d’ abus de droit.

C’est ainsi que lorsque la structure n’est constituée que pour faire écran ou lorsqu’elle est un instrument dénué de toute effectivité, elle est ainsi détournée de sa vocation légale telle que défini par l’article 1832 du code civil, le droit dégénérant ainsi en abus.

3 cas concrets peuvent être envisagés : 

a) la société fictive.

b) la filiale de façade.

c) la confusion de société.

La problématique étant posée, il convient de s’attacher à la démonstration de l’abus de droit et à la procédure adéquate (d),
pour vérifier enfin qu’elles sont les conséquences qu’il pourrait en résulter. (e)



a - LA SOCIETE FICTIVE


La fictivité d’une société est établie, lorsque les personnes qui la composent se présentant comme associés, ne sont en fait que des prête-noms ou des complices d’une autre personne elle-même associée, ou complètement étrangère à la Société.

Dans cette hypothèse les éléments constitutifs de la convention de société font défaut, « l’affectio-sociétatis »étant absent ,voire la volonté chez les intervenants de complaisance, de procéder à la rencontre des volontés associatives.

C’est ainsi qu’il a été considéré (Cour d’appel de PARIS, 3ème chambre Civile du 7/07/95 JCP Editions E 1996 1,n°541 page 117 observation VIANDIER et CAUSSIN) qu’il pouvait être considéré l’absence de toute activité propre d’une société lorsque celle ci jouait uniquement le rôle de personne morale interposée pour les besoins d’un montage juridique .


b – LA FILIALE DE FACADE


Le principe juridique, est qu’une filiale est juridiquement une société autonome, malgré la part que peut représenter la société mère, et que cette dernière peut détenir dans son capital.

Or la filiale, cesse d’être juridiquement valable et doit être considérée comme fictive et donc de façade lorsque les associés ne sont que des prêtes noms de la société mère.

Il en est ainsi lorsque la société mère entend exercer tous les pouvoirs et ne créer une filiale que pour retenir les avantages d’une interposition de personne.

La société créée, n’apparaît alors que comme un écran masquant l’activité d’une autre personne morale.

La jurisprudence a notamment considéré, établi les indices de fictivité, dans l’ absence d’autonomie patrimoniale de la filiale, l’absence d’activité économique propre, ou le défaut d’autonomie décisionnelle.

Telle est le cas d’une filiale créée dans l’unique but de supporter aux lieu et place de la société mère les risques de commercialisation d’un projet spécifique à qui la Société mère a apporté une assistance dépassant le degré d’organisation inhérent à tout groupe de société, la maintenant sous sa dépendance et la privant ainsi de toute autonomie.

(Cour d’appel de PARIS 3ème chambre 28/9/93 PIERREL es-qualité contre PUDET et autres) Bulletin Joly 1994, page 68)

Il a également été considéré par la cour suprême, (cassation commerciale 19/10/1993 N° 91-11 073 RJDA 1994 N° 169-205 que :
« Est fictive la société qui commercialise des produits fabriqués par une autre dans les locaux et avec le personnel de celle-ci sans supporter la charge d’un salarié et qui, en dépit des apparences ne constitue qu’un service de la Société mère)


c - CONFUSION DE SOCIETE

La confusion de société est notamment caractérisée par un défaut de séparation des activités ou des avoirs, une communauté de compte bancaire, une imbrication de contrats passés entre-elles, un enchevêtrement des éléments du patrimoine (Cour de Cassation commerciale 16/5/72 n° 71-11 496 RTD commercial 1973, page 335) 

Cette confusion de patrimoine entraînera le défaut de réalité d’une société dépendante d’une autre, (Confusion de patrimoine et fictivité des sociétés, J F BARBIERI, Petites affiches 25/10/1996, page 9)


d- PROCEDURE ET CONSEQUENCES:


Toute personne y ayant intérêt, peut dénoncer le caractère fictif d’une société, même son auteur propre (Cassation civile 22/6/1976)

Lorsque la fictivité est invoquée par un tiers, sa preuve peut être rapportée par tous moyens (cassation commerciale 21/03/1977 bulletin 4 n° 90).

L’action en dénonciation de fictivité ne peut être exercée pendant 30 ans. Mais, dès lors que la simulation présente un caractère frauduleux, l’action en nullité de la société fictive se prescrit par 3 ans, la cour de cassation ayant rendu un arrêt de principe le 16/06/1992.

La sanction première de la fictivité est la nullité pure et simple de la société.

La nullité de la société entraîne tout d’abord sa disparition, mais pour l’avenir, car pour le passé, la société est traitée comme une société dissoute à l’égard de tout ayant droit de bonne foi.

Ainsi lorsque les tribunaux se trouvent en présence non d’une société réelle mais d’une société fictive créée par des personnes physiques ou morales avec des capitaux et le concours de complices , et que le patrimoine social est la propriété de cette ou de ces personnes, qui l’exploitent sous le nom d’une société de façade, il est normal que le redressement ou la liquidation judiciaire soit étendue à cette ou à ces personnes, puisqu’elles ne forment qu’une seule et même personne en définitive.

La création d’une société de façade peut constituer la manœuvre caractérisant le délit d’escroquerie (Cassation criminelle 9/06/1980 bulletin criminel n° 180) ainsi que si des infractions sont commises à l’abri de la société fictive, le Ministère public ou le tiers lésé peuvent alors agir devant la juridiction répressive, pour faire écarter l’apparence et faire constater l’infraction.

Enfin la responsabilité civile peut être mise en jeu sur le fondement des dispositions légales, des articles 1382 et 1844-17du code civil, et, pour les sociétés commerciales, sur le fondement des articles 241 et 242 outre 370 de la loi du 24 juillet 1966.

Tel a été le sens de la décision rendue par la Cour d’Appel de PARIS, le 14 septembre 1993, reflétant parfaitement la notion de fictivité.

L’abus de personnalité morale qui fait de la société apparente un masque sous lequel se cache le Maître de l’affaire, permet l’ouverture d’une procédure collective, soit directement, soit par extension entre tous ceux qui agissent sous le couvert de ladite personne morale.

Lorsque la société reconnue fictive dissimulerait un contrat d’une autre nature (contrat de travail, ou contrat de prêt) c’est ce contrat qui conformément aux règles à suivre, au cas de simulation révélée, doit recevoir application 
(Cour d’appel de PARIS du 26/02/1981 GP 1982 p 669)


e) SUR LES INCIDENCES SOCIALES DES IMBRICATIONS DE STRUCTURES JURIDIQUES ET L’ABUS DE DROIT :


On vient de rappeler que l’incidence juridique de la fictivité de société, est la nullité pure et simple de la Société pour l’avenir.

Pour le passé, la société est traitée comme une société dissoute.

Or l’Article L 122-12 alinéa 2 du Code du Travail rappelle que :

« S’il survient une modification juridique de l’employeur, notamment par fusion ou transformation du fonds, tous les contrats de travail en cours, au jour de la modification, subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise »

Ce texte est applicable dans tous les cas de changement survenant dans la situation juridique de l’employeur, tels est le cas dans le cadre d’un apport partiel d’actif.

Dans l’hypothèse d’une société de façade, ou d’une fictivité de Société, la société est dissoute, les salariés prétendûment transférés ne le sont plus.

La jurisprudence française étend le champ de l’article L 122-12 alinéa 2 du Code du Travail à tout transfert, d’une entité économique autonome conservant son entité, et dont l’activité est poursuivie ou reprise.

L’entité économique s’entend d’un ensemble organisé de personnes et d’éléments corporels ou incorporels, permettant l’exercice d’une activité économique qui poursuit son objectif propre.

Pour être autonome, l’entité transférée doit être distincte des autres activités exercées par le cédant :

- d’un personnel spécialement affecté

- de moyens matériels d’exploitation propre.



Fait à PARIS,
Guillaume SAHUC
Président Fondateur de LEXILIS EUROPE.
LAUREAT DE LA FACULTE
Spécialiste en Droit Commercial et Droit Economique

E mail sahuc.guillaume@wanadoo.fr

 

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 Dernière modification : 13 août 2004