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DU CUMUL DE L’ACTION  EN GARANTIE DES VICES CACHES, DE L’OBLIGATION DE DELIVRANCE DE LA CHOSE VENDUE, ET  DE L’ERREUR SUR LA SUBSTANCE ET DU DOL 




    L’acheteur d’une chose fongible mécontent de son acquisition, peut saisir toutes juridictions utiles au travers de différents moyens juridiques.

La jurisprudence de la Cour Suprême après avoir été longtemps hésitante, semble maintenant définitivement fixée.

C’est ainsi que les moyens juridiques au soutien d’une action peuvent être envisagés au nombre de quatre :

- la notion de vice caché tel que découlant de l’ articles 1641 du Code Civil, devenu L 211-1 du Code de la Consommation.

· - le manquement à l’obligation de délivrance imposée au vendeur.

· - le vice du consentement pour erreur.

· - le vice du consentement pour dol.

Il convient très précisément de vérifier quelle est la nature de la défectuosité car la Jurisprudence, longtemps hésitante sur ce point, semble maintenant constante dans l’attente de la modification des dispositions légales, tel que l’a suggéré la Cour de Cassation, dans son rapport pour l’année 1998, tendant à voir substituer au terme « bref délai », un délai fixe.


I - VICES CACHES

Pour que la garantie du vendeur soit appelée à jouer de ce chef, il convient que le défaut caché diminue ou supprime l’usage normal de la chose à savoir que le vice doit affecter la chose elle-même, donc l’usage normal doit être défini.

Lorsque la chose vendue est un objet d’occasion, son usage normal doit être apprécié en tenant compte de son degré d’usure.

Il a été jugé par la Cour suprême qu’un véhicule présentant une usure anormale, en raison d’une consommation excessive d’huile ou de gas-oil et de la défaillance de certaines pièces, alors qu’il avait été acheté à un pris supérieur à l’argus, correspondait bien à cette définition (cassation commerciale 27/05/1986 – N° 84 14 197) d’usure prématurée d’un moteur liée à une utilisation anormale connue du vendeur.

Par ailleurs, le vice doit être caché et inconnu de l’acheteur, tout comme il doit être antérieur à l’achat de la chose, les Tribunaux considérant sur ce dernier point, que même lorsque la cause exacte de la défectuosité demeure inconnue, il existe une présomption d’antériorité.

La découverte du vice caché donne naissance à une action en garantie contre le vendeur, celui-ci pouvant opter, selon les dispositions de l’article 1644 du Code Civil, entre une action rédhibitoire et une action estimatoire, le choix de l’acheteur ne pouvant être méconnu par le Juge, l’objet du litige étant déterminé par la prétention des parties selon les dispositions du nouveau Code de procédure Civile.

La difficulté principale de ce type d’action est de répondre très précisément à l’exigence de son initiation dans le cadre d’un bref délai.

L’appréciation de cette notion est souveraine des Juges du Fond et il a été ainsi considéré qu’en matière de vente de véhicules automobiles, l’action pouvait être déclarée recevable deux ans après la conclusion du contrat, mais dans une autre affaire (TGI de NIMES – 25 /02/1970 – cassation commerciale 6/05/1981) irrecevable après la découverte de la défectuosité.

Les juges du fond apprécient souverainement les usages invoqués par l’acheteur et le point de départ du délai, lequel se situe en tout état de cause au jour de la découverte du vice, jour de la découverte effective et non jour de la livraison.

Certaines situations sont de nature à proroger le bref délai, telle qu’une citation en justice, même en référé, dès lors qu’elles interrompent la prescription ainsi que les délais pour agir.

Il a même été considéré que la recherche d’une solution amiable pour l’acquéreur suspend le bref délai, à condition que la négociation ne justifie aucunement une action tardive (Cassation commerciale 2/02/1971).


II – OBLIGATION DE DELIVRANCE


C’est en considération des dispositions de l’article 1614 du code civil que la chose doit être délivrée en l’état où elle se trouve au moment de la vente.

C’est ainsi que la chose délivrée doit donc être conforme à la chose vendue et à l’usage auquel elle était destinée (Cassation 1ère chambre civile 20/03/1989 – Cassation 1ère chambre civile 6/06/1990.)

L’acception sans réserve d’une marchandise manifestement non conforme empêche par ailleurs l’action en résolution pour faute de délivrance, de prospérer (Cassation commerciale 6/07/1993) dès lors qu’il s’agit de défaut apparent (Cassation 3ème chambre civile 22/01/1997).

La chose délivrée étant entièrement individualisée doit correspondre à ce qui a été convenu.

C’est ainsi que la Cour d’Appel de Nancy a considéré que l’indication d’un millésime 1987 pour un véhicule mis en circulation en août 1986 constituait une non-conformité du bien livré par rapport à la chose convenue entre les parties.

Lorsque la chose livrée n’est pas conforme, l’obligation supportée par le vendeur de la mettre en conformité est une obligation de résultat, car l’obligation de délivrance ne se limite pas alors à l’obligation de conservation, mais implique l’obligation de livrer la chose de façon conforme à l’intention des parties.

L’acheteur peut donc exiger que la chose vendue soit mise en conformité chez lui, aux frais du vendeur, débiteur de l’obligation.

L’acheteur est en droit de refuser la délivrance d’une chose de marque différente.

La Cour de Cassation a également admis que l’acheteur d’une automobile dont la carrosserie présentait des anomalies de peinture, avait pu légitimement refuser d’en prendre livraison, les caractéristiques d’ordre esthétique d’une chose de ce genre étant au nombre de celles en considération desquelles la vente avait été conclue.

Lorsque le contrat (qui fait la loi des parties selon les dispositions de l’article 1134 du Code Civil) n’a spécifié aucune qualité particulière, le vendeur n’est tenu de délivrer qu’une marchandise loyale et marchande compte tenu des usages.

S’agissant des documents administratifs concernant un véhicule, le vendeur doit remettre à l’acheteur ceux-ci dès lors qu’ils sont indispensables à une utilisation normale et en constitue l’accessoire (Cassation 1ère chambre civile – 22/01/1991).

Cette obligation est une obligation essentielle puisque le défaut du certificat d’immatriculation ou carte grise interdit l’usage du véhicule.

La violation de cette obligation autorise l’acheteur à demander la résolution de la vente, sur le fondement du défaut de l’obligation de délivrance.

Tout récemment, la Cour d’Appel de Paris, dans une décision du 25/10/2002 (chambre 25 section A) a considéré, s’agissant de cartes de vœux, que l’obligation de délivrance n’était nullement remplie par le vendeur.

« La différence par rapport aux énonciations du contrat constitue une inexécution de l’obligation de délivrance.

Les déformations grossières des cartes de vœux, les défauts de gaufrage, imprécis et découpes irrégulières constituent une non-conformité en raison de la différence esthétique entre les cartes livrées et les caractéristiques prévues au contrat.

Ces défauts qui affectent un pourcentage important apparaît suffisamment grave pour porter atteinte à la destination contractuelle de l’ouvrage et justifier la résolution de la vente »

(SA NARBONI C/ VERONE GRAPHIQUE)


III - VICE DU CONSENTEMENT PAR ERREUR :


C’est au moment de la formation du contrat que l’appréciation du consentement des parties est effectué.


L’article 1110 du Code Civil n’admet que deux types d’erreur :

- l’erreur sur la substance qui permet l’annulation de tous les contrats, 

- l’erreur sur la personne qui peut entraîner la nullité d’un contrat s’il est conclu uniquement en considération de la personne.

Pour déterminer l’existence d’un vice du consentement au moment de la formation du contrat, il est possible de faire état d’éléments postérieurs à cette vente (Cassation 3ème civile – 13 juillet 1999 N° 97-16 382).

Par ailleurs, une affirmation erronée ou la réticence du concédant peut constituer une manœuvre sans lesquelles le concessionnaire, induit en erreur sur les conditions de la commercialisation, n’aurait pas contracté.

C’est ainsi qu’en matière d’erreur provoquée, il est également possible de faire état du dol.

IV – LE DOL :


On entend par « dol », toute ruse, manœuvre, tromperie utilisée pour induire en erreur une personne amenée à contracter.

Le dol excuse l’erreur de la victime et par conséquent ne peut exister qu’au stade de la formation du contrat.

Il implique que la victime ait effectivement commis une erreur mais également que des manœuvres pour y parvenir aient été perpétrées, manœuvres dolosives pouvant aller de la seule rétention d’informations déterminantes appelées réticences dolosives, ou du simple mensonge verbal, pour viser la machination nécessitant une véritable mise en scène.

La dissimulation d’un vice caché peut constituer un dol (Cassation 1ère Chambre Civile 16/04/1991).

L’existence de ce vice n’exclut pas l’action en nullité pour dol et l’exigence du bref délai de l’action en garantie ne saurait être transposée.

Telle est très précisément la difficulté majeure du choix de l’action possible, offert à l’acquéreur d’un véhicule qui s’estime lésé.

Ainsi, le juge qui doit restituer aux faits leur véritable qualification peut substituer le dol à la garantie des vices cachés invoqués par le demandeur comme fondement juridique de son action (Cassation 1ère Civile 16/04/1991).


V – SUR L‘EVOLUTION JURISPRUDENTIELLE QUANT AU CUMUL DES ACTIONS POUR VICES CACHES, ERREUR ET OBLIGATION DE DELIVRANCE :


L’acquéreur, afin d’échapper à la contrainte du bref délai imposé par l’article 1648 du Code Civil, devenu Code de la Consommation, article L 211.1, sollicitait parfois des Tribunaux, l’annulation du contrat sur le fondement de l’erreur.

C’est ainsi que les Chambres Civiles de la Cour de Cassation ont tout d’abord désiré soumettre l’action en nullité pour erreur, au régime de prescription de l’action en garantie des vices cachés.

Puis la 3ème Chambre Civile d’abord, et enfin la première, ont opéré un revirement en 1988, approuvant les Juges du Fond d’avoir déclaré que l’action en nullité exercée par l’acquéreur n’était pas soumise aux dispositions spéciales de l’article 1648 du Code civil.

La Jurisprudence paraissait donc évolutive avant que n’intervienne l’important arrêt du 14/05/1996, par lequel la 14ère chambre civile a entendu mettre fin à la possibilité pour l’acheteur de cumuler les avantages du droit spécial de la vente et du droit commun des obligations.

C’est ainsi que la Cour Suprême a considéré que dès lors qu’il existe des vices cachés au sens de l’article 1641 du Code Civil, cette garantie constituait l’unique fondement possible de l’action de l’acheteur, lequel ne pouvait se prévaloir de son éventuelle erreur.

Il convient donc d’être très prudent quant au choix de l’action dès lors que la distinction entre les vices cachés affectant la chose et la conformité de la chose délivrée est tout à fait capitale, permettant ou non d’éluder la condition du bref délai.

Le vice caché résulte d’un défaut de la chose.

La non conformité résulte de la délivrance d’une autre chose que celle de son objet de la vente.

C’est ainsi que la Cour d’Appel de Paris, le 13/11/1991, a considéré que le vice caché de la chose était une anomalie nuisant au bon fonctionnement de celle-ci et la rendant impropre à l’usage auquel on la destine, alors que le défaut de conformité consiste en une différence de nature entre la chose promise et la chose livrée.

La position actuelle de la Cour Suprême est de considérer que les défauts qui rendent la chose impropre à sa destination normale constituent un vice défini par l’article 1641 du Code Civil, qui est donc l’unique fondement possible de l’action exercée.

Dès lors, le domaine de l’action contractuelle de droit commun en résolution fondée sur la non-conformité de la chose délivrée apparaît tout à fait réduit.

Il semble désormais exigé pour que cette action soit recevable que la chose ne corresponde pas à l’objet du contrat que les parties définissent de manière générique dans la convention.

En effet, les Juges du Fond, ne peuvent retenir les deux fondements juridiques distincts relativement à des actions concernant la même défectuosité du produit vendu.

En application de l’article 12 (alinéa 2) du Nouveau Code de Procédure Civile, les Juges ont maintenant l’obligation de contrôler si l’action formée par l’acheteur sur le fondement d’un vice caché ne doit pas être requalifiée en action en résolution pour non conformité (Cassation 1ère Civile 16/06/1993).

C’est ainsi que les Tribunaux veillent à ce que l’acquéreur ne tourne pas l’exigence du bref délai en agissant sur le terrain de l’article 1184 du Code Civil, pour faire reconnaître la non conformité de la chose livrée par rapport à la chose vendue.

C’est dans ces circonstances d’incertitudes procédurales, que la Cour de Cassation, dans son rapport année 1998 a suggéré au législateur, de modifier l’article 1648 du Code Civil pour substituer au bref délai un délai fixe, en constatant que la durée du point de départ du bref délai nourrissait un contentieux suffisamment abondant qui l’invitait à distinguer la garantie des vices cachés, le défaut de conformité, 
la responsabilité contractuelle de droit commun, voire l’erreur sur la chose vendue.

En attendant une réforme de ce texte, la Cour de Cassation a jugé que la notion de bref délai ne saurait constituer une restriction inadmissible au droit d’agir susceptible de violer l’article 6.1 de la Convention Européenne des droits de l’homme (Cassation 1ère Civile 21/03/2000).

CONCLUSION

Le professionnel consulté doit donc très précisément vérifier quelle est la nature de la défectuosité, car la jurisprudence longtemps hésitante, semble maintenant constante dans l’attente de la modification des dispositions légales, tel que l’a suggéré la Cour de Cassation elle-même, dans son rapport pour l’année 1998, tendant à voir substituer aux termes de bref délai de l’action en vice caché, un délai fixe.



 

Maître Guillaume SAHUC

Avocat à la Cour

Lauréat de la Faculté
Spécialiste en Droit économique et commercial

 

courriel : sahuc.guillaume@wanadoo.fr

Tel  : 06.80.31.09.87.

 

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 Dernière modification : 13 août 2004