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La synergie des professionnels du Droit au service de l’entreprise et des particuliers

 

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LA CONCURRENCE DELOYALE

INTRODUCTION : LES EXCES  INHERENTS A LA LIBERTE DU COMMERCE ET DE L’INDUSTRIE

 

Les lois des 2 et 17 mars 1991 ont consacré en France le principe de la liberté du commerce et de l’industrie. C’est ainsi que les entreprises sont libres de rivaliser entre elles afin de conquérir les marchés et de retenir la clientèle induite.

 A l’inverse  de certains pays européens, où la concurrence déloyale est définie par des textes spéciaux (Autriche, Allemagne, Espagne), le droit Français ne comporte aucune disposition spéciale en la matière, qui demeure régie par les principes généraux de la responsabilité civile selon les dispositions des articles 1382 et 1383 du code civil.

 L’absence de dispositions légales relatives à la définition de la concurrence déloyale empêche d’en déterminer avec précision les contours.

Seule est définie la notion de concurrence interdite, celle qui d’après, les auteurs, est non autorisée ou celle ressortant de la volonté des parties  ou d’une convention, au sens des dispositions de l’article 1134 du code civil.

La concurrence déloyale, quant à elle n’est définie en droit français par aucun texte de loi.

Cette notion est donc une construction essentiellement doctrinale et jurisprudentielle.

Le présent exposé aura donc pour objectif de rappeler:

Þ    La nécessaire réunion des conditions de fond, ou la preuve de l’existence d’une faute et d’un préjudice (I),

Þ    Le nécessaire respect des conditions procédurales pour prospérer en une pareille action (II).

I °) LA NECESSAIRE REUNION DES CONDITIONS DE FOND,

      LA PREUVE D’UNE FAUTE ET D’UN PREJUDICE :

 

 A) LA FAUTE:

L'action est exclusive de toute relation contractuelle entre les parties. Elle est donc fondée sur les articles1382 et 1383 Cciv.

 (Cass. Com. 1 er déc. 1987).

  Il n'y a donc pas de présomption de responsabilité et la faute doit être prouvée.

Cette faute peut toutefois être non intentionnelle. En d'autres termes, l'intention de nuire n'est pas nécessaire.

  La doctrine a établi une classification des moyens concurrentiels sous quatre rubriques : le dénigrement, l’imitation, le débauchage, le parasitisme. Ces actes traduisent tous une violation des usages du commerce.

 

Classification des comportements fautifs déloyaux :

Þ    Le dénigrement :

  Le dénigrement consiste à jeter le discrédit sur un concurrent, en répandant à son propos, ou au sujet de ses produits ou services, des informations malveillantes.

  Il peut également viser une profession toute entière : c’est l’abus de dénigrement collectif.

  Cependant, la jurisprudence considère que le dénigrement n’a pas un caractère fautif  s’il est présenté sous une forme humoristique et caricaturale.

C’est ainsi que dans cette affaire à grand retentissement médiatique, Monsieur CALVET, président de la société PSA, avait été ridiculisé par les « guignols de l’info »,le présentent systématiquement en retard à cause d’un problème de voiture.

Ayant Entrepris une action en réparation du préjudice prétendument souffert, il se vit débouté au motif qu’il existait, d’une part  un droit à la caricature, et d’autre part et surtout que les deux secteurs n’étaient pas concurrentiels.

 ( CA PARIS 14/3/95 ET Cass. 1/10/95).

  Néanmoins pour que le dénigrement soit caractérisé, il n’est pas nécessaire que soient réunies les conditions prévues par la loi du 29 juillet 1981.

  Le dénigrement peut avoir pour objet le concurrent lui-même, qu’il s’agisse d’une personne physique ou morale.

Le dénigrement peut porter sur des éléments de la personnalité du concurrent qui n’ont pas de lien direct avec son activité professionnelle.

Parfois, le concurrent dénigre seul le prix des produits.

Le dénigrement peut encore consister à critiquer la qualité des services rendus par l’entreprise concurrente.

Le dénigrement peut aussi porter sur des méthodes commerciales de l’entreprise concurrente.

Le dénigrement est constitué même si le défendeur apporte la preuve de l’exactitude des faits révèles ; l’exceptio veritatis admise en matière de diffamation n’efface pas le dénigrement et n’enlève pas à l’acte du concurrent son caractère déloyal.

Le dénigrement est caractérisé lorsque le concurrent visé est nommément désigné. Mais la jurisprudence estime qu’il y a encore dénigrement lorsque, sans être nommé, le concurrent est facilement identifiable.

Le dénigrement peut être contenu dans un tract ou un prospectus, ou tout document écrit : un journal, une lettre missive. L’ampleur de la diffusion, ou au contraire, son caractère restreint ne sera pris en considération que pour l’évaluation du préjudice.

 

Þ    L’imitation dans le but de créer une confusion avec un concurrent :

L’imitation est un  procédé qui consiste à utiliser la réputation d’un concurrent en créant une confusion avec ce dernier, afin d’en capter la clientèle notamment par l’utilisation du nom commercial ou de l’enseigne.        

L’action en concurrence déloyale protège en effet ces signes distinctifs. Le risque de confusion s’apprécie in abstracto, chez un public moyennement attentif.

L’utilisation, comme nom de domaine sur Internet, des signes distinctifs d’une autre entreprise, afin de créer une confusion avec celle-ci, a été  récemment condamnée à plusieurs reprises.       

(Tribunal de Grande Instance PARIS, 3° Ch 25 mai 1999 et Tribunal de Grande Instance Nanterre, 2° Ch, 10 janvier 2000, Cah, D. Aff. 2000, Jur, P 117)

Cependant, la jurisprudence est peu cohérente, et des arrêts écartent le risque de confusion : Par exemple, aucune confusion n’a été retenue entre « hôtel campanile et une société Le Campanile qui ne commercialise que des vins.

(Cass. Com 23/3/93 RJDA 1994, N°1, N°120)
 

Il ressort de la jurisprudence que les tribunaux tiennent compte de l’originalité des signes à protéger. Ainsi, le demandeur dont le nom commercial ou l’enseigne ont un caractère générique, sera débouté de son action en concurrence déloyale :

 Ont par exemple été jugés insuffisamment originaux pour mériter la protection, des termes tels que « pizza » (CA PARIS, 28/11/1959), ou encore « Garden center », qui est le terme générique s’appliquant à tout les commerces de cette nature, et dont l’origine étrangère  de l’expression ne confère aucun droit privatif sur son utilisation (CA AIX 22/6/78).  

Néanmoins, lorsque le nom bien que générique, correspond à une activité faisant l’objet d’un monopole, à la suite d’une concession, son utilisation peut être également protégée par l’action en concurrence déloyale.

L’imitation nécessite une situation de concurrence entre professionnels ou entreprises de même spécialité.        

Elle peut résulter de l’utilisation déloyale d’un homonyme, même si la jurisprudence tend à considérer que l’on ne peut empêcher une personne d’exercer une activité commerciale sous son nom patronymique au seul motif qu’un autre commerçant exploite déjà un commerce identique sous ce nom.

(Cass.Com 2/6/92, Lettre Distrib, 92 n°7-8 et CA PARIS, 11/10/90, D 93 somm p 116)

 

Encore faut-il que cet usage soit fait de bonne foi. La concurrence déloyale apparaît en effet lorsqu un homonyme entreprend de fabriquer, sous le même nom, un produit identique dans le but de provoquer une confusion et de bénéficier de la notoriété acquise par le premier fabricant.   

L’imitation de l’organisation ou des installations d’un concurrent peut également justifier une action en concurrence déloyale.  

Une similitude dans la présentation intérieure ou extérieure d’un établissement peut aussi être source de confusion entre deux concurrents.

La Jurisprudence est en ce domaine particulièrement abondante : Par exemple, un franchisé qui, en fin de contrat  maintien l’architecture dans ses locaux, commet une faute justifiant de la part du franchiseur une action en concurrence déloyale.

(Cass. Com 22/10/85 n° 84.10.031)

 

L’utilisation de documents commerciaux ou publicitaires est également répréhensible.

 (Cass. Com, 26/02/85 JCP ed. G 1985 IV, p 169)

 

La protection d’un produit contre toute imitation, par l’action en concurrence déloyale est-elle possible ?

Une stricte application des principes en matière de propriété industrielle devrait conduire à considérer, en vertu du principe de la liberté du commerce et de l’industrie, que tout intéressé peut reproduire, fut-ce  industriellement, une création non protégée par un droit de propriété industrielle. Admettre le contraire aboutirait à créer des monopoles d’exploitation hors de ceux qui ont été limitativement crées par le législateur.

L’action en concurrence déloyale ne saurait être utilisée comme un succédané de la contrefaçon de brevets dessins ou modèles, lorsque celle-ci peut être retenue.

Dans ces hypothèses, l’action en concurrence déloyale n’est recevable qu’à la condition de s’appuyer sur des faits autres que ceux susceptibles de constituer le délit de contrefaçon. Il faut donc invoquer des actes distincts de ceux portant atteinte à la marque.

Une importante jurisprudence, fréquemment confirmée par la Cour Suprême s’est développée pour condamner, sur le fondement de la concurrence déloyale, la copie servile d’un produit. Il n’est d’ailleurs pas nécessaire que l’auteur d’une telle copie ait été animé par la volonté de créer une confusion. En effet, le seul fait d’offrir un produit à la vente sous une présentation identique à celle déjà utilisée par un concurrent constitue au moins une faute d’imprudence, suffisante pour qualifier un acte de concurrence déloyale.

(CA PARIS, 8/10/92 D. 1994, som, p 203)

Cependant, lorsque des raisons techniques imposent la reproduction à l’identique, s’agissant d’une forme fonctionnelle, l’idée de concurrence déloyale est exclue.
 

Þ    le débauchage :

Si  le principe de la liberté du travail doit permettre à un salarié de changer d’emploi au mieux de ses intérêts, son passage chez un concurrent est une des sources les plus fréquentes de fuites du savoir faire ou des secrets d’affaires en direction d’entreprises rivales.

ü      La concurrence déloyale est indiscutable en cas de signature, en connaissance de cause, par le nouvel employeur, d’un contrat de travail alors que le salarié est encore sous contrat avec un autre employeur.

(Cass. COM. 15/02/83, JCP 1983, ed G 1983 IV,p 137)

Le nouvel employeur, coupable de concurrence déloyale engage sa responsabilité délictuelle à l’égard de son concurrent, alors que le salarié ayant rompu son contrat de travail est responsable contractuellement envers son précédent employeur.

ü      La concurrence déloyale est également indiscutable dans l’hypothèse où le salarié a été embauché par un nouvel employeur alors qu’il était lié au précédent par une clause de non concurrence.

(Cass. Com. 23/10/84 JCP 1985ed G, IV, p 169)

ü      La désorganisation commerciale d’une entreprisse par le détournement de commandes et le démarchage sont également constitutifs d’actes de concurrence déloyaux :

Ainsi, le fait pour un commerçant d’exécuter lui-même, en connaissance de cause, une commande adressée à un concurrent, ou le fait de provoquer, en allant parfois jusqu’au racolage des clients, la résiliation de commandes déjà passées auprès d’un concurrent, constitue une faute susceptible d’être qualifiée d’acte de concurrence déloyale. 

ü      Le détournement des listes des clients ou des fournisseurs d’un concurrent, souvent obtenues avec le concours d’un ancien salarié de ce dernier, constitue un moyen classique de détournement déloyal de la clientèle et de désorganisation commerciale d’une entreprise rivale.

(Cass. Com 24/3/98, n°96-15-906, pour un agent d’assurance)

 

Þ    Le parasitisme:

  Le parasitisme consiste à utiliser la réputation d'autrui sans nécessairement rechercher de confusion.

  C'est donc détourner à son profit la notoriété d’un concurrent.

  L'auteur de ces agissements déloyaux qualifiés de «concurrence parasitaire » ne cherche pas nécessairement à créer une confusion dans l'esprit du public entre son entreprise ou ses produits et l'entreprise ou les produits d'un concurrent.

  La jurisprudence vient de donner une définition cette notion :

  En effet, dans un arrêt du 26 janvier 1999, la Cour de cassation a défini le parasitisme économique comme «l'ensemble des comportements par lesquels un agent économique s'immisce dans le sillage d'un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire ».

(Cass. Com. 26 janv. 1999,  D 2000, Jur., p 87).

 

Les agissements parasitaires se retrouvent aussi dans le secteur de la distribution puisque des distributeurs cherchent fréquemment à tirer un avantage personnel de la notoriété attachée à la marque d'un fabricant, avantage illégitime dans la mesure où l'on ne peut considérer que ce dernier, en vendant ses produits au distributeur, l'a implicitement autorisé à profiter de cette réputation (en ce sens, Cass. Com. I er déc. 1987, ).

  La notion de rattachement à une entreprise concurrente est également caractéristique de comportement parasitaires : le rattachement à l'entreprise concurrente peut se faire à travers la publicité créée par celle-ci : la reprise d'une association d'idées utilisée lors d'une campagne publicitaire constitue une «publicité parasitaire ».

  La jurisprudence pousse aujourd’hui encore plus loin sa réflexion sur la notion de parasitisme puisque dans des hypothèses où des commerçants ne sont pas en situation de concurrence, l’imitation d’une formule publicitaire a été condamnée sous l’angle du parasitisme, parce qu’entreprise dans le but de profiter à moindre coût des campagnes promotionnelles du parasité

(Cass.Com 30/01/96, JCP ed E 1996,  pan, n°395)

  Le «rattachement indiscret » peut encore résulter de la seule installation dans la même localité, lorsque le nom de cette localité se trouve lié à la qualité d'un produit. C'est le cas pour le village de Baccarat, depuis que des cristalleries d'art en ont fait une indication d'origine.

  Le parasitisme peut aussi résulter du rattachement «indiscret » à une profession : la Cour de cassation a approuvé la condamnation d'un organisme de conseils juridiques pour avoir commandé l'insertion, dans un annuaire professionnel, sous la rubrique «notaires », d'un encart publicitaire destiné à mettre en valeur la profession de conseil juridique, cet organisme ayant, «dans des conditions fautives, créé un risque de confusion entre ladite profession et celle de notaire »

 (Cass. Com. 16 janv. 1985 n° 83-11-924 ).

 

L'imitation d'un catalogue d'entreprise est également un agissement parasitaire.

(Cass. Com. 30/01/2001)

  Aujourd'hui, nouvelle évolution du parasitisme : La notion de parasitisme est aujourd'hui souvent invoquée par les tribunaux pour sanctionner ce qui leur paraît être une appropriation injuste du travail d'autrui.

  Si des agissement fautifs doivent être prouvés, encore convient-il de déterminer l’existence d’un préjudice.

 

B)LE PRÉJUDICE :

  L'exigence d'un préjudice implique qu'il existe entre les parties «un rapport de concurrence ».

  Il appartient aux tribunaux d'apprécier si les parties en litige sont en «situation de concurrence, laquelle «s'entend de deux offreurs proposant des biens assez similaires ou rapprochables pour prétendre à la satisfaction du même intérêt ou du même besoin »

 (CA Versailles, 14e ch., 2 févr. 199.)

  En principe, il n'existe de situation de concurrence qu'entre des professionnels ou des entreprises de même spécialité, s'adressant à la même clientèle.

  Mais, d'une manière générale, il n'est pas exigé que la spécialité de l'entreprise victime de pratiques déloyales et celle de l'auteur de ces pratiques soient rigoureusement identiques ; il suffira qu'ils exercent des activités voisines ou semblables.

  Ainsi, l'état de concurrence peut être admis entre un supermarché comportant des rayons d'épicerie, de boucherie, de restauration, avec les petits commerçants exerçant dans le voisinage des activités semblables.

Les tribunaux ont donc aujourd'hui tellement élargi la notion de rapport de concurrence qu'ils semblent près de s'affranchir de l'exigence de cette condition, rapprochant ainsi la concurrence déloyale des agissements parasitaires.

 

a)La nature du préjudice :

  Le préjudice consiste en l'occurrence en une perte de clientèle et de bénéfices, ou perte de «contrats », se traduisant par une baisse de chiffre d'affaires, et pouvant même aller jusqu'à la perte d'une partie de la valeur patrimoniale d'une entreprise.

 (Cass. com. 20 févr. 1996).

  Cependant, la preuve d'un préjudice chiffré n'est pas nécessaire pour voir la demande accueillie.

  Si le préjudice doit en principe être certain, la jurisprudence tend aujourd'hui à admettre le préjudice éventuel conférant ainsi un caractère préventif à l'action.

  Le préjudice moral est admis lorsqu'une atteinte est portée à l'image ou à l'enseigne de la marque.

  Dans le domaine des agissements parasitaires, le préjudice consiste, pour l'entreprise parasitée, dans la perte d'une chance de développement.

  Cependant, lorsqu’une sanction professionnelle est également encourue, le cumul de dommages-intérêts n'est pas possible puisqu'un même fait ne peut entraîner deux conséquences juridiques cumulatives.

(Cass. Civ. 1°, 18/2/97)

  

b) La preuve du préjudice :

  Conformément aux principes de la responsabilité délictuelle, il appartient au demandeur de prouver la réalité de son préjudice.

(Cass. Com. 12/11/92).

  La Cour D'appel de RIOM dans un arrêt remarquablement motivé du 9 /10 1991, a rappelé et précisé ce principe :

  « Il convient de rapporter la preuve que l'acte de concurrence critiqué entaché d'une faute, caractérisée par des pratiques déloyales, justifiant réparation s'il en résulte un préjudice ;

  Attendu en effet et plus précisément qu'une action en concurrence déloyale doit pour être fondée, et conformément au droit commun de la responsabilité civile donner lieu à démonstration d'un préjudice, et d'un préjudice présentant un lien de causalité avec la faute commise laquelle faute doit, non seulement être établie avec les caractéristiques de manœuvres constitutives de concurrence déloyale, mais également présenter une gravité suffisante pour justifier, indépendamment du préjudice, qu'il soit donné réparation de celui-ci ».

(CA RIOM 11/02/1998).

  Cependant, en matière de concurrence déloyale la jurisprudence considère parfois que la preuve de la faute emporte celle du préjudice. (Cris. com. 9/2/93).

  C’est ainsi qu’il a été récemment considéré par la Cour de Cassation que «  dès lors que la faute était constituée, le préjudice, fût-il seulement moral, devait recevoir réparation. »

(Cass. Com 9/2/93)

Cette solution  est en contradiction avec les principes de la Responsabilité civile.

  La Cour d'Appel de Riom s'écarte d'ailleurs de cette position en distinguant la nécessité de rapporter la preuve de la faute de celle du préjudice qu'il soit économique moral ou éventuel.

 

 

II°) LE NECESSAIRE RESPECT DES CONDITIONS PROCEDURALES :

   

A) Les conditions de l’action :

 

            1°) Compétence territoriale :

            L’article 46 du Nouveau Code de Procédure Civile dispose que :

  « Le demandeur peut saisir à son choix, outre la juridiction du lieu où demeure le défendeur :

-         en matière contractuelle, la juridiction du lieu de la livraison effective de la chose ou du lieu de l’exécution de la prestation de service ;

-         en matière délictuelle, la juridiction du lieu du fait dommageable ou celle dans le ressort de laquelle le dommage a été subi ; »  

Dans ces circonstances, compte tenu du caractère très diffus du dommage concurrentiel, lequel réside dans la perte de clientèle, il est préférable d’assigner au lieu de livraison de la chose ou d’exécution de la prestation.  

Il peut en effet être malaisé de déterminer le lieu où ce dommage s’est réalisé, notamment lorsque la clientèle est disséminée sur un vaste territoire.

  

) Compétence d'attribution :

Les tribunaux de commerce sont compétents pour connaître des délits et quasi-délits commis par un commerçant à l'occasion de ses activités professionnelles.

Le conseil de prud'hommes n'a compétence que dans la limite où les faits répréhensibles se rattachent soit à l'obligation générale de fidélité incombant au salarié durant l’exécution du contrat de travail, soit à une clause de non concurrence après expiration de celui-ci.

  Les juridictions administratives ont compétence exclusive dans une affaire de concurrence déloyale opposant deux concessionnaires de services publics.

 

3°) Prescription :

           

  a)     Prescription décennale :

L’action en concurrence déloyale, intéressant le monde des affaires, est en conséquence exercée par des commerçants.

L’action doit donc être exercée dans un délais de dix ans, conformément aux dispositions de l’article L 110-4 du Code de Commerce, selon lequel, la prescription extinctive décennale est applicable à «  toutes les obligations nées de leur commerce, entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants. »

  Toutefois, ce délais de prescription ne commence à courir que du jour où les faits de concurrence déloyale ont cessé.

  C’est ainsi par exemple, que la Cour de Cassation a jugé recevable l’action fondée sur l’usurpation du nom commercial exercée par le restaurateur parisien « Maxim’s », à l’encontre d’un concurrent niçois, alors que ce dernier utilisait depuis cinquante ans la dénomination litigieuse. La Cour Suprême a en effet considéré que la simple tolérance de la part de la victime ne s’analysait pas en un abandon du droit d’agir.

(Cass.Com 2/11/66, Gaz.Pal 67, 1,P 45)

   

2)     Prescription de trois ans :

Si les agissements déloyaux s’analysent en une faute civile, ils peuvent également constituer une infraction pénale.

En effet, dans une affaire de dénigrement, les éléments constitutifs du délit de diffamation sont susceptibles d’être réunis. En pareille hypothèse, et si le plaideur choisit de porter l’action civile devant les juridictions répressives, il lui faut alors respecter le délias de prescription de l’action publique.

  En matière délictuelle, ce délais est précisément de trois ans.

  En revanche, lorsque l’action civile est exercée devant les juridictions civiles, celle-ci se prescrit selon les règles du droit civil, conformément aux dispositions de la loi du 23 décembre 1980, qui mis fin au principe de solidarité des prescriptions.

   

 

B) Les effets de l'action :

  La condamnation au versement de dommages-intérets n’est pas la seule sanction possible, ni quelquefois la seule recherchée par le lésé.  

 Nombre de victimes recherchent à donner une ampleur médiatique à leur affaire.

C’est la raison pour laquelle, priment souvent sur les mesures principales, des mesures accessoires telles que des mesures de publication de la décision, de destruction, ou de confiscation de matériel détenu par une entreprise reconnue coupable de concurrence déloyale.

  Par ailleurs, la loi du 2 juillet 1963 a prévu au bénéfice de celui qui introduit une action en réparation du préjudice subit du fait d’actes de concurrence déloyale, la possibilité de demander « qu’en attendant qu’il soit définitivement statué au fond, la cessation des agissements reprochés au défendeur soit ordonnée à titre provisoire et sous astreinte comminatoire. »

    Cependant, l’application de la loi du 2 juillet 1963 reste subordonnée à l’entrée en vigueur d’un décret en conseil d’Etat qui n’a jamais été publié.

    C’est la raison pour laquelle, malgré l’existence de cette procédure spéciale, et face à l’évolution de la jurisprudence admettant aujourd’hui largement la compétence du juge des référés, et indépendamment des mesures d’instruction in futurum sollicitées dans le cadre de l’application de l’article 145 du Nouveau code de Procédure civile, le juge des référés peut être saisi à l’effet de voire ordonner la cessation des agissements déloyaux.

Conformément aux dispositions de l’article 873 du Code de Commerce, ces mesures peuvent être ordonnées à titre provisoire ou sous astreinte comminatoire pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

   

    CONCLUSION 

 EVOLUTION DE LA JURISPRUDENCE ET PERSPECTIVES :

 

La nouvelle notion de parasitisme permet aujourd’hui lorsque les conditions traditionnelles de la concurrence déloyale ne sont pas suffisamment caractérisées, de se rabattre sur les dispositions légales du code de commerce, lesquelles qualifient d’agissement parasitaire tout comportement par lesquels un agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre, afin de tirer profit de ses efforts et de son savoir faire sans rien dépenser.

. La théorie du parasitisme bien qu’initialement accueillie avec réticence par une doctrine fixiste, n’en constitue pas moins une avancée jurisprudentielle majeur.

Cependant, l’on ne saurait approuver une mise en jeu excessive du concept, laquelle conduirait à méconnaître les textes principaux.

Ainsi, dans un arrêt étonnant et fort critiquable, la Cour d’Appel de PARIS a cru pouvoir accueillir l’action visant l’article 1382 du code civil dirigée par la célèbre maison Cartier  contre le distributeur Metro, qui avait offert à sa clientèle la copie d’une montre créée après la première guerre mondiale et dont la protection  en tant que modèle avait pris fin.

  Il faut espérer que cet excès ne perdure pas et que la Cour Suprême n’encourage pas ces dérapages qui porteraient tort à une avancée jurisprudentielle qu’il convient de préserver.


Pour LEXILIS EUROPE
 

Maître Guillaume SAHUC

Avocat à la Cour

Lauréat de la Faculté
Spécialiste en Droit économique et commercial

 

courriel : sahuc.guillaume@wanadoo.fr

Tel  : 06.80.31.09.87.

 

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 Dernière modification : 13 août 2004