UN MONDE PARALLELE
Lorsque JULIEN et CECILE se séparent, CANELLE est toute
petite et manifestement, ils n'ont ni l'un ni l'autre suffisamment de maturité pour
réaliser très bien ce qu'ils sont en train de faire et ce qui les attend.
Aussi, comme ils se sont
aimés avec passion, ils se sépareront avec haine, sa sur
jumelle.
Tant et si bien que le
Juge des Enfants du lieu de leur résidence, conscient de leur incapacité temporaire à
s'occuper de leur petite fille, va décider de confier provisoirement, avant que des
enquêtes sociales ne soient faites, la domiciliation de l'enfant à la grand-mère
paternelle, ancienne éducatrice, parfaitement capable, dans un premier temps, de servir
de lieu neutre et d'espace de sauvegarde pour cette petite fille totalement désemparée,
âgée à l'époque de un an.
Durant deux ans, la
bataille judiciaire fera rage.
A l'issue d'enquêtes et
de saisines de Juge, c'est le Juge aux Affaires Familiales qui va rendre une décision,
confiant la domiciliation de l'enfant à la mère, et réservant au père un droit de
visite et d'hébergement.
Très vite, Cécile va
décider de quitter son lieu de résidence avec la petite fille et part s'installer à 300
Kms.
Malheureusement, encore
très jeune et dénuée de tout emploi, elle ne s'insèrera que très mal et va vivre dans
des conditions extrêmement difficiles tant pour elle que la petite fille.
De son côté, JULIEN,
qui se stabilise semble t-il plus vite, trouvera un travail et se rendra compte rapidement
que CANELLE n'est pas bien avec sa mère.
Aussi, à l'issue des
vacances d'ETE 1996, il va refuser, et alors qu'il vit dans une région du SUD de la
FRANCE, de rendre l'enfant et la gardera par-devers lui.
Seize jours après
exactement, CECILE déposera plainte contre lui pour non-représentation d'enfant, mais ce
qui est extrêmement curieux, elle ne tentera quasiment jamais, sauf par un ou deux appels
téléphoniques, de venir récupérer sa fille alors qu'elle connaît parfaitement
l'adresse de JULIEN.
Car ce problème
d'adresse est bien le problème majeur qui va conduire à cet imbroglio judiciaire
absolument extraordinaire.
A cette époque là,
JULIEN, qui jusqu'à présent vivait à la Rue des Pinçons, seul, fait la connaissance
d'Hélène.
Rapidement, un couple se
crée et se rendant compte qu'il ne pourra continuer longtemps à vivre tout seul, JULIEN
décide de s'installer chez HELENE.
Il quitte donc la Rue des
Pinçons et s'installe Avenue du Siècle.
Parallèlement, il
relève appel de la décision qui est rendue et qui confie la domiciliation de l'enfant à
la mère.
Cette affaire est
évoquée dans le courant de l'année 1997 devant une COUR D'APPEL du centre de la FRANCE
dont les magistrats sont de grande réputation mais qui n'ont pas l'habitude de favoriser
la cause des pères.
Or, curieusement et alors
que la mère avait demandé à ce que l'enfant lui soit restitué sous astreinte en
exécution de la décision appelée, les magistrats ordonnent une nouvelle enquête
sociale mais de ne défèrent pas à la demande de CECILE.
Au cours de cette
instance, CECILE est parfaitement au courant de ce que JULIEN a changé d'adresse et qu'il
vit maintenant avec une tierce personne.
Elle le sait d'autant
plus qu'alors qu'elle est entendue pour la première fois par les services de Police à la
suite de la plainte qu'elle a déposée, audition qui a lieu le 11 AVRIL 1997, elle donne
l'adresse de JULIEN.
L'enquête sociale a
lieu.
JULIEN n'a pas d'emploi
très déterminé mais il s'organise bien et arrive à vivre très correctement avec la
compagne qui, elle travaille, et la petite CANELLE.
Si, durant l'été, il
assure la surveillance d'un centre de loisirs, et l'enquêteur social désigné par la
COURD'APPEL va venir le visiter sur son lieu de travail.
Bien plus, JULIEN qui est
un garçon sérieux et honnête, lui indique qu'à compter du mois de SEPTEMBRE 1997, il
va quitter la résidence dans laquelle il vit avec HELENE, et va s'installer dans un
nouvel appartement dont il donne l'adresse et dont il communique les plans à l'enquêteur
social, autant d'informations qui sont dans le rapport d'enquête sociale.
Durant toute cette
période, CECILE ne cherchera pas à voir CANELLE.
L'affaire suit son
cours devant la COUR D'APPEL et au mois de JANVIER 1998, et plus précisément le 25, la
COURD'APPEL confie la domiciliation au père et réserve à la mère un droit de visite et
d'hébergement progressif, qui doit dans un premier temps s'exécuter dans un Point
Rencontre de la ville dans laquelle demeure JULIEN.
Quelques jours avant
l'audience de la COUR D'APPEL, CECILE réagit curieusement en demandant à un avocat de
saisir le Juge de l'Exécution afin de faire respecter la décision qui a pourtant été
appelée et sur laquelle les avocats ont déjà plaidé attendant le délibéré pour une
semaine après.
Cette procédure devant
le Juge de l'Exécution est aussi inopérante qu'inutile et juridiquement totalement
fantaisiste mais très importante puisque l'assignation est délivrée par un huissier de
la ville dans laquelle vit JULIEN à sa nouvelle adresse.
Cela signifie de façon
absolument incontestable qu'en JANVIER 1998, à minima, CECILE sait parfaitement où
demeure CANELLEet JULIEN.
Le temps passe
tranquillement, et malheureusement pour CANELLE, sa maman ne veut pas venir la voir.
Le Point Rencontre
prend contact avec elle et attestera plus tard qu'à trois reprises, la mère a été
sollicitée et qu'elle a refusé devenir voir l'enfant.
Elle ne se présentera
pas plus au domicile de JULIEN qu'elle connaît parfaitement ?.
En AVRIL 1999, JULIEN
l'apprendra par la suite, CECILE est entendue par les services de police, et curieusement,
elle déclare à ce moment là qu'elle ne connaît pas l'adresse de JULIEN qui aurait
disparu.
Les services du parquet
du Procureur de la République de la ville dans laquelle demeure CECILE, vont donc
diligenter des procédures de recherche et de citation à la dernière adresse connue de
JULIEN et curieusement, alors que tout le monde connaît son adresse, la preuve en est
rapportée, ni l'huissier, ni les services de l'ordre, pas plus que Monsieur le Procureur
de la République, ne le retrouveront, et JULIEN sera qualifié comme parti sans laisser
d'adresse, domicile inconnu.
La suite est absolument
extraordinaire et hallucinante.
Cité une première fois
devant le Tribunal Correctionnel du lieu de résidence de CECILE au mois de JUIN,
l'affaire sera renvoyée en SEPTEMBRE pour vice de procédure.
Durant toute cette
période et alors qu'elle était présente à l'audience, CECILE ne dira jamais qu'elle
connaît l'adresse.
En SEPTEMBRE 1999,
l'affaire vient enfin devant le Tribunal Correctionnel.
Bien entendu, JULIEN
n'est pas présent ni représenté et CECILE, cela ressort du plumitif d'audience, est
entendu par la Présidente du Tribunal Correctionnel.
Elle ne donnera pas
l'adresse de JULIEN, pas plus que son avocat, dont il faut imaginer qu'il n'avait pas
été mis au courant.
La sanction tombe : 1 an
de prison ferme, mandat d'arrêt... !
Certes, l'on aura
beau m'expliquer que cette sanction a été prononcée parce que le Tribunal Correctionnel
souhaitait faire sortir JULIEN de son refuge, pensant qu'à l'époque qu'il se cachait, il
n'en demeure pas moins que je ne l'ai quasiment jamais vu en 22 ans de carrière,
appliqué à une mère.
Le fait est qu'au mois de
JANVIER 2000, JULIEN reçoit une convocation à son adresse que tout le monde connaît
depuis deux ans et demi, et que l'on retrouve enfin, alors que quelques mois avant, on ne
savait soi disant pas où il vivait.
Il s'y présente très
simplement et arrivé dans les locaux des forces de l'ordre, il se voit signifier son
mandat d'arrêt et immédiatement arrêté et incarcéré.
Il est présenté devant
le Procureur de la République du lieu de sa résidence qui ne l'avait pas trouvé soi
disant quelques mois avant.
Il fait opposition et
passe 5 jours en prison, sans avoir la moindre possibilité de contact ni avec son avocat,
ni avec sa famille.
L'on imagine aisément
les états d'âme de ce garçon, sachant que sa petite fille âgée de 6 ans, l'a vu
disparaître du jour au lendemain sans aucune explication, incarcéré alors qu'i l n'a
jamais eu le moindre problème au milieu de délinquants et dans une maison d'arrêt dont
la réputation a fait récemment la une des journaux.
Au bout de 5 jours,
menottes aux mains, il est présenté devant le Tribunal Correctionnel.
Le matin de
l'audience, le Procureur de la République, contacté par l'avocat de JULIEN, avait
adopté une position très dure indiquant que cette affaire était d'une gravité
extraordinaire et qu'il allait requérir le maintien du mandat de dépôt.
Heureusement, ce
magistrat, intègre, modifie son attitude et sa position dès qu'il voit le dossier que
l'avocat de JULIEN lui présente.
Il requiert
lui-même à l'audience, la levée immédiate du mandat de dépôt.
L'affaire est renvoyée
pour être jugée dans quelques mois.
Voici donc un
dossier qui appelle une réflexion sur les justices et leur incapacité manifeste à se
connecter.
Depuis longtemps,
lorsqu'en 1983, reçu par le ministre de la solidarité, elle me demanda ex abrupto :
" Si vous aviez la possibilité de modifier immédiatement quelque chose dans notre
loi, que feriez-vous ? " Je lui ai répondu : " Créer de véritables chambres
de la famille composées de magistrats réellement motivés par les Affaires Familiales et
qui auront à connaître à la fois des aspects civil et pénal de ce droit de la famille
".
Si nos responsables politiques prenaient conscience que les
réformes qu'ils envisagent tous les trois ou quatre ans ne servent rigoureusement à
rien, et qu'en définitive seul un budget concret et conséquent permettrait au magistrat
de faire leur travail correctement en se réorganisant et en prenant le temps d'étudier
le dossier, de telles aberrations n'auraient pas eu lieu.
En attendant, JULIEN a
passé 5 jours en prison et ne sera jamais indemnisé car il y a fort à penser qu'il sera
relaxé du délit de non-représentation d'enfant, la mère n'ayant jamais cherché à
récupérer sa fille, ce qui est tout de même extraordinaire, et ayant même indiqué au
Point Rencontre qu'elle ne voulait plus la voir.
Il y aura que très peu
de chance d'obtenir des dommages et intérêts et d'ailleurs il ne cherchera pas à le
faire contre la mère de son enfant, qui a sciemment menti à la justice en ne donnant pas
son adresse alors qu'elle la connaissait parfaitement.
Et puis il y a
CANELLE, cette petite fille de 6 ans, que l'on a réussi à préserver grâce à
l'intelligence des magistrats qui ont pris conscience de l'erreur qui avait été commise
mais qui a tout de même été privée de son père pendant 6 jours, sans comprendre cequi
arrivait.
La leçon
servira-t-elle ?
Suite au prochain numéro
... !
Me MEJEAN
SCP Franck MEJEAN
Avocats
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